Article mis à jour le 2 juin 2022

Bien sûr je ne vous parlerai ici que des productions officielles, si vous vouliez savoir où dénicher de nouvelles graines de weed, vous n’êtes pas du tout au bon endroit.

Nous n’abordons pas ici les pays producteurs de chanvre récréatif, le cannabis, mais bien de la filière de chanvre industriel (cosmétique, construction, alimentaire, textile et pharmaceutique)

La confusion est classique et normale, j’en parle d’ailleurs ici.  

Si on veut comprendre l’évolution de la culture de chanvre, il est utile de ne pas les confondre. Les choses sont assez simples en réalité.

Le mot chanvre est utilisé pour parler du cannabis à usage “industriel” (textile, cosmétique, alimentation, construction) et le mot “cannabis” pour parler du cannabis à usage récréatif. 

Dans les deux cas, on sélectionne des plantes qui sont issues de la même espèce botanique : “Cannabis Sativa L “. Pour la petite histoire, ce nom latin de l’espèce se traduit en français  par “chanvre cultivé L; le L représentant le nom du botaniste, Mr Ligné, qui a identifié la plante au 18 ème siècle.

Il existe des centaines de variétés de Canabis Sativa plus ou moins riches notamment en tétrahydrocannabinols (THC) et en Cannabidiol (CBD). THC et CBD étant les 2 substances cannabinoïdes les plus connues et recherchées.

En réalité, il en existe une centaine de cannabinoïdes dans chaque plante. 

Le THC est réputé comme ayant des effets psychotropes négatifs sur la personne, ce qui n’est n’est pas le cas du CBD qui est reconnu comme ayant plutôt des vertus relaxantes sans aucun effet nuisible. 

En fonction des objectifs de production, l’agriculteur sélectionne évidemment les “sous variétés”  plantes les plus adaptées à ses besoins. 

Pour le  chanvre industriel, en Europe, l’agriculteur devra impérativement veiller à sélectionner des plantes ayant une teneur en THC inférieur à 0.2%.

La culture du chanvre est en effet réglementée par un Règlement -  l'article 32.6 bis du règlement (CE) no 1307/2013 - autorisant  la culture de la plante de cannabis à moins de  0,2 %. de THC. 

En outre, selon les pays, les agriculteurs doivent respecter des règles légales nationales  pour la mise en culture du chanvre (autorisation, dérogation, semences de cultivar autorisées, règles de production, …).

Tout récemment, lors d’une conférence chez Valbiom, j'ai appris que la European Industrial Hemp Association - EIHA-  était en faveur de faire passer ce taux à 0,3 %. Une raison simple :  élargir le panel de variétés de plantes accessibles pour favoriser davantage d’applications. Ceci pourrait être une bonne nouvelle pour le secteur textile. Good news.

En Europe, on cultive le chanvre depuis l’arrivée des … Celtes. Vous voyez que ce n’est pas une lubie de bobo !

Comme l’explique Henri Alain Ségalen dans Le Chanvre en France (livre que je vous conseille), avant le Moyen Age, chaque ferme (et ce dans toutes les régions) possédait sa chènevière (champ de chanvre) sur ses terres les plus fertiles.

Pourquoi faire pousser du chanvre ?

Comme une évidence naturelle ... A l'époque, on utilisait le chanvre pour à peu près tout.

La graine pressée donnait de l’huile pour l’éclairage, mais aussi de la glu, du savon, et même de la peinture. Le chanvre servait aussi à nourrir les bêtes et surtout, la tige défibrée permettait de produire des cordes et de la ficelle.

Après le filage et le tissage, on fabriquait des toiles. Et les plus gros consommateurs de chanvres étaient les marins. Cordes, voiles, sacs, tentes, vêtements, colmatage des coques, filets de pêche et j’en passe. Si ça ce n’est pas la preuve que la toile de chanvre résiste à tout !!

Ceci étant dit, où produit-t-on du chanvre ?

Même si on parle beaucoup de chanvre autour de nous, il faut bien être conscient que sa production reste dérisoire. 

Dans le monde des fibres naturelles, c’est évidemment le coton qui occupe le haut du panier.  A lui seul, le coton représente 75 % de la production mondiale de fibres naturelles. Le lin en représente près de 3 % et le chanvre seulement un peu plus de 0.5 %.  

Au niveau mondial, la production de chanvre reste minime même si on lui reconnait une belle croissance ces dernières années.

En 3 ans, de 2016 à 2019, la production mondiale de chanvre est passée de 99.000 ha à 275.300 ha (source Interchanvre).

En écrivant ce papier, j'aurais aimé  trouver des données certaines, recoupées à plusieurs reprises, malheureusement cela ne semble pas évident sur le sujet. Du coup je vous invite à prendre ces chiffres surtout comme des indicateurs de tendance.

Les données publiées sur le sujet indiquent les surfaces agricoles consacrées à la culture du chanvre. Par simplification, je parlerai de “production”.

Les principaux producteurs de chanvre dans le monde, données 2019 - Source Interchanvre

Assez naturellement, c’est à la fois culturel et historique, le premier producteur de chanvre dans le monde est la Chine. Viennent ensuite les Usa, l’Europe et le Canada.

La production de  chanvre en Europe

La France est de loin le plus important producteur européen de chanvre, elle produit des grains, des fibres et de la chènevotte. En 2019, la surface cultivée de chanvre en France était de près de 18.000 hectares. 

Quasi tous les pays européens ont aujourd'hui une petite production de chanvre. A titre d'information, en Belgique, la production de chanvre est évaluée en 2019 à 188 hectares.

Qu’en est-il du lin ?

Par comparaison, la culture du lin ( l’autre fibre végétale très similaire au chanvre), est en effet nettement plus développée.

France : 97.500 hectares de lin & 17.900 de chanvre

Belgique : 15.300 hectares de lin & 188 !!! de chanvre

Pays-bas : 2.400 hectares de lin et … (c’’est des champions) 3833 de chanvre

Elle est aussi beaucoup plus concentrée : seuls  trois pays européen ont une production significative de lin alors que près de 10 pays européens consacrent plus de 1.000 hectares à la culture de chanvre.

Ce qui montre aussi que le chanvre est une plante qui peut pratiquement être cultivée partout sur tout type de sol, dans des climats de de 7 à 30 degrés.

Le chanvre se sème entre mars et avril et se récolte à partir du mois de septembre. Son cycle court (une centaine de jours) est très intéressant pour les agriculteurs.

En plus, comme ses racines plongent jusqu’à 2 mètres sous terre, ses besoins en eau sont plutôt faibles (surtout si on les compare à ceux du coton, voir à ce sujet l’article « quelle quantité d’eau faut-il pour produire un tee-shirt ? »).

Aujourd’hui, la plus grande contrainte liée à la production de chanvre est liée à sa récolte. Les machines sont encore trop peu adaptées à de grandes surfaces et les fibres spécialement solides du chanvre ont tendance à se prendre dans les mécanismes.

Alors, à quand une rationalisation durable et raisonnée de la production de chanvre ?

Car malgré toutes les qualités écologiques qu’offre le chanvre, la plante semble encore peu exploitée. Les chiffres du développement du lin dans nos pays sont un signe d’encouragement pour les prochaines années.

A suivre ! On ne perd pas espoir !